Un influenceur peut-il être considéré comme un mannequin salarié ?

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La question s'est posée de savoir si le contrat de représentation exclusive conclu entre un influenceur et son agence pouvait être requalifié en contrat de travail, notamment par l'intermédiaire du statut de mannequin, voir du statut d'artiste interprète.

Un influenceur bénéficiant d’une certaine notoriété et titulaire de plusieurs comptes sur les réseaux sociaux exerce une activité de communication sur internet.


Il conclut un contrat de « représentation exclusive » avec une agence d’influence.

Dans ce contrat, il est prévu :


  • Que l’influenceur concède à la société d’influence, à titre exclusif, la gestion de sa participation aux Campagnes Instagram et TikTok (campagnes individuelles ou collectives)

  • Que l’influenceur confie à la société, à titre exclusif, la mission de manager de la gestion de ses activités et de sa carrière 

  • que l’influenceur confie à la Société une mission de Manager et d’apporteur d’affaires
A la suite d’un litige entre l’agence et l’influenceur, celui-ci demande au Conseil de Prud'hommes de reconnaitre l’existence d’un contrat de travail entre lui et l’agence. Il demande donc que le contrat de représentation exclusive soit requalifié en contrat de travail.

Pour cela, il prétendait exercer une activité de mannequin, justifiant le recours au statut de salarié.

Pour rappel, le code du travail prévoit que "tout contrat par lequel une personne s'assure, moyennant rémunération, le concours d'un mannequin est présumé être un contrat de travail (article L.7123-3 du code du travail).


Cependant la cour d’appel relève que l’influenceur lui-même se présentait comme un « créateur de contenu ». Donc, il ne se contentait pas, en pratique, de prêter son image pour réaliser une prestation normée et contrôlée par l'annonceur. L’influenceur ne peut donc pas prétendre agir comme un « simple » mannequin.

Ensuite, la Cour d’appel se demande s’il existait ou non un « lien de subordination » entre l’influenceur et son agence, qui justifierait l’existence d’un contrat de travail.

Selon les juges, l’influenceur devait effectivement appliquer des feuilles de route contenant certaines instructions. Il recevait ainsi des « briefs » contenant l'ensemble des caractéristiques de la Campagne, telles que la désignation des produits ou services à promouvoir, les réseaux sociaux concernés, les contraintes et exigences relatives aux contenus Influenceur et les éventuels contenus Annonceur à publier ou relayer. 

Cependant, la Cour d’appel remarque :

  • que l'influenceur, qui créait des mises en scène, en fonction de choix créatifs, demeurait libre de réaliser des vidéos selon son propre style et de déterminer la manière selon laquelle il présentait le produit.

  • Qu’il disposait d'une totale liberté choix quant à la réalisation des Campagnes qui lui étaient proposées par son agence, et qu'il a pouvait refuser d'y participer, ce qu’il avait d’ailleurs fait, au moins à une reprise


En conséquence, la Cour d’appel a jugé qu’il n’y avait pas de lien de subordination entre l’influenceur et son agence et qu’en conséquence, il ne pouvait pas être considéré ni comme un mannequin, ni comme un salarié.

Le contrat "de représentation exclusive" conclu entre les deux est donc un contrat commercial et tout litige relevant de l'application ou de la rupture de ce contrat relève du tribunal de Commerce.
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Cour d’appel de Paris du 23 février 2024, RG nº 23/10389

Sur la question, posée dans le même dossier : l'influenceur peut-il être considéré comme un artiste-interprète : Voir  notre article sur ce sujet.

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