
Un dirigeant et associé d'une entreprise peut-il perdre 600 000 € en ignorant une clause d'un pacte d'associé ? Oui, c'est précisément ce qui est arrivé à un dirigeant de SAS sanctionné par la Cour d'appel pour avoir pris une décision sans respecter le pacte d'associé.
Le contexte
Le directeur général et associé minoritaire d’une SAS, également lié à la société par un contrat de travail, s’octroie unilatéralement à ce dernier titre une indemnité de 10 400 € pour compenser les congés payés qu’il n’a pas pu prendre.
Le problème
Le pacte d’associés obligeait le dirigeant, pour ce type de décision, à obtenir l’accord préalable d’un « comité stratégique ».
En passant outre, il a violé ce pacte.
La sanction est double
Sur le fondement de la violation du pacte, il est licencié et révoqué pour faute grave de ses fonction de dirigeant, ce qui entraîne :
- La perte de l’indemnité de révocation prévue par le pacte d’associé (100 000 €).
- L'obligation de céder ses actions pour un prix décoté en application de la clause de « bad leaver » (200 000 € au lieu des 800 000 € espérés)
La Cour d’appel de Versailles est ensuite saisie de ce litige commercial.
2. Ce qu’a décidé la Cour d’appel de Versailles
La Cour confirme la faute grave : le dirigeant a ignoré les règles claires du pacte d’associés.
- Peu importe que le service paie ait « validé » l’indemnité ou que l’assemblée générale ait approuvé les comptes : la priorité, c’est le respect du pacte.
- Résultat : le dirigeant perd son parachute financier et revend ses titres avec une forte décote.
En clair : dans une SAS, le pacte d’associés peut primer sur tout le reste. Ne pas le respecter, c’est courir un risque important.
Cour d'appel de Versailles - 10-12-2024 n° 21/05807
FOCUS : A quoi sert un pacte d'associés ?
Un pacte d’associés est un contrat privé qui vient compléter les statuts. Il définit :
- Les règles de gouvernance (qui décide quoi, comment et quand).
- La protection des minoritaires (droit d’information, clauses de sortie).
- Les pénalités en cas de manquement (ex. décote sur le prix de rachat des actions).
- Anticiper les conflits et éviter le tribunal.
- Eviter les blocages
- Adapter la gouvernance à la réalité de l’entreprise, plus finement que les statuts.
FOCUS: Les clauses de bad leaver et good leaver
La clause de bad leaver prévoit qu’un associé ou dirigeant qui quitte la société dans de mauvaises conditions — par exemple pour faute grave, violation du pacte d’associés ou départ non autorisé — devra revendre ses actions à un prix décoté, parfois fortement (jusqu’à 80 %).
Elle s’oppose à la clause de good leaver, qui s’applique en cas de départ légitime (départ à la retraite, inaptitude, décès…). L’associé ou dirigeant perçoit alors la valeur réelle de ses titres, voire une prime.
Ces clauses peuvent être insérées dans le pacte d'associés ou pacte d'actionnaires.
Elles permettent de protéger les intérêts de la société et de ses actionnaires en cas de conflit ou de séparation. Elles évitent également les litiges commerciaux.
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